Portrait d’une inconnue habillée en costume traditionnel 1784
Ivan Petrovich Argunov (1729–1802) est fondateur de l’école russe de peinture de portraits, célèbre pour ses portraits de la noblesse de son époque.
La famille Argounov occupe une place particulière parmi les beaux arts en Russie. Tous les Argounov, en dépit du fait qu’ils étaient serfs, ont apporté une contribution significative au développement de la culture russe.
Ivan Petrovich Argounov a vécu 73 ans.
Selon les historiens d’art, le manque de liberté fut une tragédie sans pouvoir l’affirmer. Le sert dans le monde féodal est une personne sans liberté individuelle, attachée à une terre, et assujettie à des obligations professionnelles précises.
Né dans une famille d’architectes et de peintres, les argunov sont attachés au prince Cherkassky. En 1743, les Argunov sont devenus la propriété du comte Sheremetev une des plus riches familles russes, par transaction maritale entre familles nobles. Le futur artiste a été élevé par son oncle de Saint-Pétersbourg, S.M.Argounov, un homme curieux et énergique.
Quand l’oncle remarque le talent du jeune garçon, il en informe le comte Sheremetev. Le comte amoureux d’art lui offre une éducation artistique approfondie.
Au XVIIIe siècle, la mode des galeries ornées de portraits de famille était bien vivante. Le comte Sheremetev souhaita que son artiste « maison » étudie les vieux portraits de ses ancêtres conservés dans les domaines, pour en faire des tableaux à la mode, et pour peindre les Sheremetevs vivants.
Ivan Argounov apprend la peinture avec son cousin Fiodor Leontievitch Argounov et l’allemand Georg Christopher Groot (1716-1749) peintre invité en Russie en 1743, au moment où la fille de Pierre le Grand, Elizabeth Petrovna prend le trône.
Ivan Argunov commence comme peintre d’icônes et des peintures décoratives. Trois de ses premières œuvres emblématiques ont survécu : « Jean de Damas » (église Sté Catherine), « Sauveur » et « Notre-Dame », et se distinguent par la facilité décorative et ludique de style rococo. Le visage de jean de Damas, un représentant exceptionnel de l’église grecque, philosophe, poète, est interprété de manière peu habituelle.
La maîtrise de Groot a répondu aux exigences de la haute société russe. Il utilise des couleurs vives et élégantes, est très attentif aux détails, a cherché à transmettre la splendeur du style baroque, très à la mode à l’époque.
Argunov s’attache à peindre des portraits caractérisés par les traditions de la peinture russe au parsun, et par la volonté de l’artiste d’idéaliser les personnages.
Dès 1746, il est un peintre de la cour, il peint des portraits d’Elizabeth Petrovna, les grands-ducs Peter Fedorovich, puis Pierre III et Catherine II. Groot a enseigné au jeune Argounov, la maîtrise des détails, comment remplir les toiles de couleurs vives, pour rendre les portraits officiels, cérémonieux et théâtraux.
Argunov revient à Saint-Pétersbourg en 1750. La famille Sheremetev apprécie ses talents et ses compétences. Il peint des portraits du prince Ivan Ivanovich et de la princesse Ekaterina Aleksandrovna Lobanov-Rostovsky.
Portrait de la Princesse Ekaterina Alexandrovna Lobanova-Rostovskaïa (1754)
En 1753, Argounov fait le portrait cérémoniel de P. B. Sheremetev avec un chien. L’artiste tente de rendre le portrait véridique et réaliste.
Par la suite, Argunov acquiert une technique plus sure et sera attaché à représenter une image précise et claire, aux couleurs sobres avec un point de vue soigneusement amical envers ses modèles.
Dans les portraits des conjoints KA et HM Khripunova (1757), proches de la famille sheremetev et sans doute bons amis de l’artiste, il crée un nouveau style pour la Russie de l’époque, le portait intime ou de la vie quotidienne.
Le mari est représenté avec un journal, l’épouse avec un livre ou un tricot. Il peint les Khripunovs, en essayant de créer des images de personnes modestes ou ordinaires, peintes avec dignité et traits attrayants.
L’expression de la valeur intrinsèque de la personne humaine s’est développée dans l’intelligentsia démocratique russe dans les années 1750-1760 et a trouvé son incarnation dans les œuvres du maître Argunov.
En 1767, Argunov peint des portraits d’enfants notamment un portrait de la jeune fille kalmouk Annouchka.
Portrait d’Anouchka, jeune fille Kalmouk (1767)
Cette toile est considérée comme le chef d’œuvre d’Ivan Argounov. Tout y est enfantin, innocent, doux, charmant.
L’artiste Argunov vit chez les Sheremetev comme un membre de la famille, respecté et apprécié. Il est également respecté et admiré par ses clients.
Le comte Sheremetev, puis son fils Nikolai par la suite, lui font confiance. Le comte Nikolai Petrovich Sheremetev est une personne instruite qui a fait ses études à l’Université de Leiden, s’est rendu en Europe occidentale pendant quatre ans, familiarisé avec la littérature et l’art de ces pays. Cette éducation explique son respect pour le peintre qui sera nommé directeur de la construction, et en charge des finances des domaines familiaux.
Catherine II, après avoir vu son portrait, écrit à l’artiste qu’elle a été agréablement surprise « l’idée est bonne, le travail aussi, il y a aussi des similitudes dans le visage ».
Ivan Petrovich Argounov a peint de nombreux portraits pendant toutes ces années avant de mourir en 1802 à Moscou.
On dit qu’il était serf, mais libre, jamais pauvre ou misérable, la maison du comte Sheremetev était sa maison, il était libre de partir, mais il est resté comme si son talent l’avait placé en dehors de l’échelle sociale.
En 1816, selon la volonté du comte, le fils d’Ivan Petrovich Argunov (Nicolaï) est devenu un homme libre. Argunov a été le dernier serf de la famille.
L’impératrice Elizaveta Petrovna, fascinée par le talent d’Argunov, publie un décret spécial pour envoyer trois garçons (de la chorale de la cour) — Losenko, Sablukov et Golovochevsky étudier la peinture d’Argunov.
Au fil du temps, le principe de l’individu apparaît dans ses tableaux, de rares peintres de l’époque ont réussi à transmettre dans les portraits autant de caractéristiques psychologiques, et de variété de personnages et de classes sociales.
Modeste et objectif dans son approche du modèle, les meilleurs portraits d’Argunov sont des documents historiques précieux d’une époque, car il ne trichait pas avec la réalité, sans oublier la valeur artistique de ses travaux.
Le portrait d’une inconnue habillée en costume traditionnel 1784. Il s’agit d’une jeune paysanne en costume de fête, costume traditionnel richement orné avec broderie et grande coiffe kokochnik dorée sur la tête. Après avoir fait le portrait de l’aristocratie. Argunov peint cette paysanne en bonne santé aux joues roses, dans ces plus beaux atours, fière et à l’égale des hauts personnages de la Russie de l’époque. Elle est assise, tournée de ¾ et porte un corselet brodé de fils doré et argenté, des boucles d’oreilles assorties à son collier et une chemise à manches bouffantes. Un grand soin est porté aux détails vestimentaires. Le personnage pose et semble être perdu dans ses pensées, le regard au loin, tranquille et serein. L’identité de la femme du tableau reste incertaine, et a donné sujet à de nombreuses controverses. On a supposé qu’il pouvait s’agir de la nourrice des enfants de la famille.
Le portrait est d’un style baroque avec fond noir et précision des détails.
Le critique d’art T.A. Selinova a effectué une nouvelle attribution d’un tableau conservé au Musée d’État russe. Après de longues études, ce portrait est considéré comme un autoportrait d’Ivan Argounov, en déchiffrant les trois lettres « IPA » représentées sur la toile. On y voit un jeune homme plein d’énergie, dans une courte perruque poudrée et de beaux vêtements. Dans sa main droite, il tient un objet, un pinceau enduit de peinture noire. À côté se trouve un crayon, un « stylo à dessin en cuivre » et deux boussoles. Ils sont disposés de manière à former un monogramme des lettres « IPA » : Ivan Petrovich Argunov, un merveilleux portraitiste, un homme énergique, de grand talent.
Les toiles d’Ivan Argunov sont actuellement conservées dans la galerie d’État Tretiakov, le musée d’État russe, le musée historique d’État, le musée de l’Ermitage et dans les musées du domaine Kuskovo et Ostankino.
References
M. Stokstad, M. Cothern : Art history, Laurence King Publishing Ltd, London, 2011
Tatiana Ilina : Chefs d’ouevre de la peinture russe, ed art aurora, 1989
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