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Azote : Magendie découvre son rôle en nutrition

Magendie citation

 

 

À la fin du 18e siècle en France, les éléments chimiques principaux ont été identifiés, ainsi que les méthodes nécessaires pour déterminer leur nature. 

Les vapeurs alcalines dégagées par la décomposition animale ont été identifiées comme des vapeurs ammoniaques comportant l'azote ou le nitrogène. Les graisses, les glucides et les amidons ne contenaient selon les connaissances de l'époque que le carbone hydrogène et l'oxygène.

 

La question se posait ainsi : les humains ont -ils besoin de se nourrir pour remplacer leurs tissus ? Comment les aliments qui manquent d'azote peuvent -ils être nutritifs ?

 

Un chirurgien parisien, physiologiste aussi, François Magendie, a étudié cette question en administrant à des chiens plusieurs types de nourritures simples, agréables au goût et sans azote. Les chiens qui consommaient du sucrose (hydrates de carbone) ont commencé à grossir après 10 jours et ils sont morts après un mois de ce régime. D'autres essais utilisant l'huile d'olive, plusieurs sortes de beurres ont donné les mêmes résultats.

Magendie a conclu que les chiens avaient besoin d'un apport nutritionnel comportant  de l'azote pour vivre, et sont incapables de se nourrir et d'assurer leurs besoins en azote en utilisant l'azote atmosphérique, en ajoutant que la multiplicité des éléments nutritifs est une règle d'hygiène importante à la survie.

majendie

L'Académie des Sciences invite Magendie à  étudier si la gélatine, obtenue à prix bas en bouillant des os, pourrait être employée comme produit de substitution des  viandes dans les hôpitaux. Après plusieurs années de recherches, il décrit des résultats contradictoires, les chiens avaient leur apport nutritif adéquat en nitrogène, mais leur santé se détériorait. Il demande l'aide de chimistes pour savoir ce qu'il manque dans cet aliment, pourtant riche en azote, il pensait au manque de fer, ou d'autres éléments minéraux.

Aujourd'hui, nous savons parfaitement  que dans la gélatine manquent les acides aminés essentiels qui sont présents dans la viande des muscles, et que les chiens ne peuvent  survivre en bonne santé à un régime sans acides aminés essentiels.

Magendie en découvrant l'importance de l'azote dans l'alimentation, contribue au progrès des sciences de la nutrition, et souligne que les résultats obtenus durant l'expérience sur un animal pouvaient servir comme base valable à la nutrition humaine. Cette idée fut révolutionnaire dans la pensée médicale en France de cette époque qui considérait les humains comme des espèces ayant un fonctionnement différent de celui des animaux.

 

Magendie :  Tout est à faire

 

Né le 6 octobre 1783 à Bordeaux, il rend l'âme le 7 octobre 1855 à Sannois.

Si vous passez par le cimetière du père La chaise, vous trouverez la tombe de François Magendie, pas très loin de la tombe d'un autre grand médecin, Bichat.  L'ironie du sort a réuni enfin les deux hommes qui ont passé leur vie à opposer leurs doctrines.

On peut définir Magendie comme un physiologiste expérimental, qui découvre pour la première fois les fonctions des nerfs rachidiens, et décrit les effets sur l'organisme de la strychnine et de la morphine, et aussi pour la première fois l'anaphylaxie (choc allergique). Il a fondé le journal de la physiologie expérimentale. On le peut définir également comme le mentor de Claude Bernard.

François Magendie est né à Bordeaux le 6 octobre 1783. À l'âge de huit ans, son père, chirurgien, l'emmène à Paris. Ce père médecin et disciple de Jean-Jacques Rousseau laisse l'enfant libre de toute contrainte. L'enfant comprend vite l'intérêt de l'instruction et entre à l'école primaire pour obtenir à 14 ans le Grand prix de connaissance des droits de l'homme et de la constitution.


En 1791, la famille Magendie monte à Paris où le père fait plus de politique que de médecine. François fréquente l'école élémentaire où il fait de rapides progrès.
À l'âge de 16 ans, il entame ses études médicales auprès de Boyer, chirurgien à l'Hôtel-Dieu. À 19 ans, il est nommé interne, et quatre ans plus tard, aide d'anatomie. L'année suivante, il soutient une thèse " sur les usages du voile du palais avec quelques propositions sur la fracture du cartilage des côtes ". Cette thèse sera le premier de nombreux travaux qui vont procurer à Magendie une gloire et une renommée mondiale.

Magendie a 19 ans lorsqu'il est nommé au titre de deuxième de sa promotion, (27 avril 1803), étudiant en médecine, puis interne à l'hôpital Saint-Louis à Paris. En 1807 il devient assistant en anatomie à l'École de médecine où il donne des cours d'anatomie et de physiologie. Docteur en médecine en 1808, il va œuvrer pour faire entrer la biologie dans le champ des sciences exactes.

Il inaugure sa carrière scientifique par un manifeste où il dénonce le danger des hypothèses, attaquent les doctrines vitalistes de Bichat, et jette les bases d'une physiologie cellulaire, 30 ans avant la découverte de la cellule par Schwann. Il s'intéresse au poison utilisé sur les flèches des indigènes de Java pour isoler plus tard la strychnine. Il étudie le mode d'action  des toxiques, incrimine la voie veineuse, et tente d'en fournir la preuve en inventant la technique des anastomoses vasculaires entre animaux qui sera à l'origine 100 ans plus tard, de la transfusion sanguine.

Il reprend l'étude des toxiques, indique leur action sur l'homme et sur les animaux, et introduit dans la thérapeutique de nombreux médicaments nouveaux, en publiant un formulaire dont le succès sera considérable.

 

Ses travaux ont commencé en 1809 ont eu un énorme retentissement, ils font de Magendie le père de la pharmacologie expérimentale.


Pour se consacrer à ses recherches, il démissionne en 1813 de ses fonctions de professeur, et abandonnent l'anatomie et la chirurgie. Il loue un amphithéâtre, et donne des leçons de physiologie qu'il illustre d'expériences parfois inédites. Il démontre le mécanisme des vomissements, le danger de substance émétique, définit les mouvements de l'oesophage, décrit la formation des images sur la rétine, et la composition du sucre pancréatique. En physiologie, il découvre les troubles oculaires liés aux carences alimentaires, il décrit l'anaphylaxie. Il applique les lois de la physique et de la chimie à l'étude des phénomènes vitaux, dont les conclusions vont être publiées dans un livre important : précis élémentaire de physiologie, qui sera réédité en quatre éditions, livre traduit en allemand et en anglais.

La découverte à laquelle son nom demeure attaché, est celle des fonctions des racines rachidiennes. Ses recherches, vers 1822, l'avaient amené à établir que les racines antérieures sont motrices, les racines postérieures sont sensitives. L'anatomiste anglais Bell prétendait avoir décrit ces phénomènes quelques temps plutôt.

Magendie accepte la priorité de l'anatomiste anglais en ce qui concerne les racines antérieures, et maintient son point de vue pour le reste, et découvre la sensibilité récurrente des racines antérieures. La querelle se prolonge. Finalement, Claude Bernard donne raison à Magendie.

Dans ses Leçons sur le sang, publiées en 1838, Magendie proclame la nécessité d'utiliser toutes les ressources de la science en plein essor : "Un médecin qui n'a pas appelé à son aide la chimie, la physique, qui ne s'est pas livré à l'art difficile des expériences sur les animaux, etc. - et beaucoup sont dans ce cas - ce médecin, dis-je, ne voit souvent dans une réunion de malades que des gens plus ou moins souffrants, des moribonds, des convalescents. "

En 1821, Magendie est nommé médecin des hôpitaux, directeur du service des femmes à l'Hôtel-Dieu. Ses nouvelles fonctions lui valent moins de gloire. D'un voyage d'étude à Londres au moment de l'épidémie de choléra de 1831, il a rapporté l'impression que cette infection n'était pas contagieuse. Un an plus tard, l'épidémie de choléra à Paris de 1832 le fait changer d'avis. Après sa publication sur l'épidémie de choléra, la gazette médicale de Londres publie des articles mettant en cause le crédit du savant français. Cependant, en 1843, il est nommé président du comité d'hygiène publique, et pendant l'épidémie de choléra à Dunkerque, il affirme à nouveau la non-contagiosité du choléra.

À l'occasion de la découverte de l'anesthésie générale à l'éther, Magendie fera d'autres erreurs.

 

À l'Académie des sciences, il critiqua violemment la pratique de l'anesthésie à l'éther qu'il estime dangereuse et sans valeur, s'emportant contre ses contradicteurs, en évoquant la morale, il se fait huer. De son point de vue, l'éther peut provoquer chez les patientes des hallucinations érotiques, et peut mettre en danger le geste du chirurgien. Il déclare qu'il ne saurait soumettre une femme à ce genre d'anesthésie.

 

Des jugements aussi téméraires interrogent chez un homme aussi rigoureux que Magendie. Certains voient dans ces affirmations " puériles " un trait de caractère. En fait, en dépit d'une rigueur scientifique et expérimentale indiscutable, Magendie avait un caractère très difficile. Il était querelleur, combatif, entêté, et un peu irrévérencieux. C'est dans le journal des sciences médicales, le journal de Bichat, qu'i publia son premier mémoire, celui-là dans lequel il critique âprement les théories vitalistes de Bichat en les traitant d'absurdité. D'autre part, Magendie est vaniteux. Quand après l'épidémie de choléra, il reçoit malgré tout la Légion d'honneur, il s'écrie : je la crois bien placée.

 

Le caractère de Magendie est un mélange d'énergie et de franchise, indépendance de jugement et opinions tranchantes et obstinées avec mépris des conventions.  Il se voit en représentant d'une génération nouvelle, en rupture avec tous ceux qui l'ont précédé, de là sa fameuse formule : " supposons que rien n'est fait et que tout est à faire ".

Vaniteux, agressif, Magendie a commis des erreurs célèbres, dont certaines sont difficilement pardonnables : refuser toute valeur aux données du microscope, nier la contagiosité du choléra au cours de l'épidémie de 1832, attaquer Bichat sans relâche.


Ces travers ne peuvent pas diminuer son mérite. Il était un grand travailleur, un ambitieux, studieux ce qui a fait sa carrière et lui-même, il était également un remarquable professeur et un enseignant dévoué.  Il a créé la physiologie moderne et la pharmacologie. Ces élèves étaient peu nombreux, parmi lesquels on peut citer le célèbre Claude Bernard, choisi par Magendie comme préparateur, puis plus tard comme son successeur au collège de France.

 

Magendie est resté en place malgré les changements de régime, témoin de sa compétence, et de son unité. Il meurt en 1855, à l'âge de soixante-douze ans, probablement d'une cardiopathie. Il meurt chargé de gloire et de titres : professeur au collège de France, membre de l'Académie des sciences, membre de l'Académie de médecine, commandeur de la Légion d'honneur. .

 

Réf
J.E Lesch, Science and Medicine in France : The Emergence of Experimental Physiology, 1790-1855, Harvard University Press, 1984

 

 

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