Lolita : Nabokov sans tabou

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Il n'est pas rare de lire que Nabokov est parmi les plus grands écrivains occidentaux du 20e siècle, avec sa prose riche en métaphores et en nuances. Il n'est pas rare non plus, de lire que ses romans sont pornographiques, indécents et troublants.   
Il serait prétentieux de tenter de résumer le roman ou de commenter le style de Nabokov en quelques pages. Pour les amateurs, les livres universitaires ou pour le grand public, concernant Nabokov ne manquent pas. Il s'agit d'un texte de présentation, d'une introduction.    

" Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon péché, mon âme. Lo-lii-ta : le bout de la langue fait trois petits pas le long du palais pour taper, à trois reprises, contre les dents. Lo. Lii. Ta.
Le matin, elle était Lo, simplement Lo, avec son mètre quarante-six et son unique chaussette. Elle était Lola en pantalon. Elle était Dolly à l'école. Elle était Dolorès sur les pointillés. Mais dans mes bras, elle était toujours Lolita. "

Dans son roman Lolita, Nabokov présente son œuvre sous la forme du journal intime d'un quadragénaire, Humbert Humbert, follement séduit par une fillette de 12 ans.


Le livre fut interdit comme d'autres romans majeurs du XXe siècle : l'amant de lady Chatterley,  Ulysse, etc.


Il a toujours été compliqué de parler de relations sexuelles en littérature, est de décrire les émotions ou les actes sexuels. Étrangement, la censure a été présente au sein des démocraties occidentales. Et si la liberté individuelle était respectée, la sexualité dans la littérature subissait une censure sans réelle justification. Cette censure a stimulé l'enthousiasme des écrivains, qui tentèrent avec intelligence et courage de la dépasser.


L'interdiction de ce genre de roman surtout dans les pays anglo-saxons, révèle un certain puritanisme, et une confusion entre la fiction littéraire et la pornographie. Actuellement, cette confusion n'existe plus, seules la structure du roman et la qualité narrative distinguent un texte littéraire d'un texte pornographie.


Nabokov a joué un rôle important dans le changement culturel en occident dans les années 60,  surtout dans les pays anglo-saxons. La censure littéraire était moins sévère en France. De nombreux chefs-d'œuvre écrits en anglais ont été édités en France, comme des livres de Laurence, de Miller,  de Joyce etc.


Le roman de Nabokov a été publié pour la première fois en France en 1955, après le refus de nombreux éditeurs américains et britanniques. Le manuscrit semblait problématique, traitant de sujets brûlants : la sexualité, la sexualité avec l'enfant et la pédophilie, la famille recomposée.

Le destin de ce roman rejoint les grands chefs-d'œuvre censurés. Les critiques en France ont considéré ce roman comme un grand livre. Les auteurs et les critiques en Angleterre ont acclamé le livre de Nabokov. Graham Greene a considéré ce roman comme le meilleur roman de l'année. Après ces bonnes critiques, le roman de Nabokov fut édité aux États-Unis en 1958, puis en Angleterre en 1959.

 

 

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" Mais ma Lolita était une gamine enjouée. Je sentis ses yeux posés sur moi, et lorsqu'elle poussa enfin ce gloussement que je chérissais tant, je sus que ses yeux riaient. Elle se tourna de mon côté, et ses chauds cheveux bruns vinrent frôler ma clavicule. Je mimai un médiocre simulacre de réveil. Nous restâmes tranquillement allongés. Je caressai tendrement ses cheveux et tendrement nous nous embrassâmes. Son baiser possédait des raffinements plutôt comiques, ce qui porta à son comble mon embarras : il avait je ne sais quoi de papillonnant et de butinant qui m'amena à conclure qu'elle avait été initiée à un âge précoce par une petite lesbienne... Soudain, en une explosion de jubilation frénétique (la marque de la nymphette !), elle appliqua sa bouche contre mon oreille - mais il fallut tout un moment à mon esprit avant de pouvoir séparer en mots intelligibles la tornade brûlante de son murmure, et elle rit, écarta ses cheveux de son visage et revint à l'assaut, et l'étrange impression de vivre dans un monde de rêve totalement nouveau, où tout était permis, s'empara peu à peu de moi tandis que je commençais à comprendre ce qu'elle suggérait. "  


Lolita de Vladimir Nabokov a bouleversé et épouvanté certains publics américains lors de sa publication en 1955. Pourtant, ce roman est devenu un best-seller.


Il décrit sa liaison avec une jeune " nymphette " nommée Dolores Haze, ou Lolita. Humbert mentionne ses antécédents psychiatriques, son premier mariage à une femme nommée Valeria, qui le laisse pour un autre homme.
Humbert loue une pièce chez Charlotte Haze et sa fille, Dolores. Charlotte envoie Lolita en colonie de vacances. Pendant ce temps, elle propose le mariage à Humbert qui accepte parce que le mariage lui donnera l'occasion d'être avec Lolita.


La mère découvre le journal intime d'Humbert. Après l'avoir lu, elle découvre le dégoût d' Humbert pour elle et son désir pour Lolita, Charlotte court dans la rue pour poster une lettre à Lolita au sujet des intentions pathologiques de Humbert, elle est tuée dans un accident de voiture.


Humbert et Lolita passent la nuit dans un hôtel où ils vont faire l'amour pour la première fois et deviennent amants. Humbert dit à Lolita plus tard que sa mère est morte, et ils commencent un long voyage ensemble.
Ils sont suivis par Clare Quilty, un écrivain pédophile qui désire Lolita. Soudainement, Lolita disparaît. Nous apprenons à la fin du roman qu'elle est allée avec Clare Quilty.


Trois ans après sa disparition, Humbert reçoit une lettre de Lolita lui annonçant qu'elle se marie et qu'elle est enceinte, et qu'elle a besoin d'argent. Humbert va chez elle, lui dit qu'il l'aime, lui donne quatre mille dollars. Elle avoue à Humbert qu'elle avait eu une liaison avec Quilty. Humbert part chez Quilty et le tue.
Nous apprenons dans l'Avant-propos qu'Humbert est mort ensuite en prison et que Lolita est morte en accouchant d'un mort-né

Beaucoup de critiques ont condamné ce livre en le qualifiant de pornographique, "d'obscène", un livre sur la psychologie et sur l'activité sexuelle d'un pédophile. Quelques années plus tard, les critiques ont applaudi l'originalité de ce livre enseigné dans les cercles universitaires comme chef-d'œuvre.


En même temps, aux États-Unis, Kinsey publie ses études sur le comportement sexuel. Nabokov et Kinsey ont osé profaner les mythes de l'innocence sexuelle.

 

 

Nabokov a toujours refusé le caractère pornographique de son œuvre en insistant sur le caractère frictionnel, sur le contexte de l'histoire. En dépit de l'admiration exprimée par les critiques et par les études, le roman de Nabokov a suscité d'interminables polémiques, sur la pédophilie, l'âge du consentement, le comportement sexuel vis-à-vis des enfants.

Nabokov avait hésité avant de publier son roman, redoutant les critiques et la censure. Il avait expliqué dans les journaux qu'il ne cherchait pas à légitimer les relations entre les adultes et les enfants et qu'il exposait seulement des personnages et des comportements dans un contexte social. L'écriture et le style de Nabokov offrent à ses romans l'élégance, la profondeur des grands romans. Aucune vulgarité, aucune profanation du langage.

Dans ce roman, le lecteur peut s'étonner de la virtuosité stylistique de Nabokov, de ses inventions métaphoriques, et de ses phrases qui ressemblent à celle de Proust associant humour et sensualité.

Le récit de Nabokov est étonnant, présenté sous forme de mémoire, une narration poétique comme un rêve, qui décrit, qui regarde, qui observe. Dans ce rêve onirique, Nabokov envoie le lecteur vers les zones grises de l'être humain où seule l'éthique peut trouver les limites. Humbert Humbert devient meurtrier, en dépit de la poésie qui habite sa tête, et de l'humour de sa narration.

Comme d'autres textes importants, le roman de Nabokov est plus compatible avec l'interprétation qu'avec l'analyse.

Les personnages sont complexes, les motivations sont multiples. Il n'est pas aisé de faire un jugement moral sur un comportement ni sur un personnage. Pendant que le narrateur exprime son désir pour le corps de la jeune fille, il exprime sa douleur d'un amour impossible avec elle. Pendant qu'il la maltraite, il tue son agresseur pour la protéger de son propre comportement.

La perversion d'Humbert n'est pas seulement une pédophilie, mais un narcissisme majeur : il cherche l'objet de son désir, l'objet docile de sa satisfaction sexuelle. Incapable d'aimer, ses actes de cruauté envers Lolita commencent quand il essaie de la garder pour ses besoins sexuels.

Lolita objet ambigu de désir, est un être en fuite, comme écrit Nabokov, une créature en métamorphose. Lolita est une créature hybride, moitié femme moitié enfant, demi-démon, demi-ange, mi-bête, mi-beauté. Cette ambivalence de la nature de Lolita résiste à toutes les tentatives d'Humbert à saisir cette créature enfant - femme, cet être " bestial et beau ".
Humbert est un mélange complexe d'un débauché qui " détruit " la vie d'une jeune fille et un romantique naïf souffrant dans la poursuite d'un idéal inaccessible.


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" La petite Lo manipula ma vie de manière énergique, prosaïque, comme si c'était un gadget insensible déconnecté de moi. Toute impatiente qu'elle fût de me faire admirer l'univers des vilains garnements, elle ne s'attendait manifestement pas à certaines discrépances entre la vie d'un garnement et la mienne. Seul l'orgueil la retint de renoncer ; car, dans l'état étrange où je me trouvais, je m'appliquai à simuler une stupidité suprême et la laissai faire ce qu'elle voulait - du moins aussi longtemps que je pus le supporter. Mais à vrai dire tout cela est hors de propos ; je ne m'intéresse pas le moins du monde à ce que l'on appelle communément le "sexe". N'importe qui peut imaginer ces éléments d'animalité. Je suis mû par une ambition plus noble : fixer une fois pour toutes la périlleuse magie des nymphettes. "  


Le langage est un thème fondamental de Lolita, sa capacité à révéler, à dissimuler, à travestir, à jouer avec la beauté et l'intelligence. Humbert maîtrise l'usage des mots, il tente de convaincre le lecteur que sa relation avec Lolita fut une relation amoureuse, en jouant avec les mots, les idées.

Humbert aime Lolita d'un amour sincère. Lolita est présentée comme une gamine vulgaire, séductrice qui joue avec les sentiments d'Humbert. Elle l'embrasse en premier, elle le séduit, elle le quitte pour un autre pédophile.
Maurice Couturier, le préfacier, écrit : " Cela soulève le problème, jamais vraiment résolu, du rapport entre l'éthique et l'esthétique "

Lolita est devenu un mythe littéraire, car il transmet un sujet difficile et important, le désir de prolonger l'enfance, la hantise de la perte, de l'oubli. L'enfance et ses souvenirs, la mémoire comme deuxième vie. Le temps devient une obsession pour Humbert qui vit dans une vision poétique où le rôle de la mémoire est déterminant.

Lolita est victime de ces miroirs réels ou imaginés par Humbert, elle ressemble aux héroïnes de Kawabata dans " Sleeping Beauty ". Elle existe par le regard d'Humbert qui devient tragique et comique, qui cherche l'amour absolu, la beauté idéale, comme un héros romantique.

Le temps est illusion, le devenir est dans le passé, l'instant présent est un futur passé, un futur souvenir à se remémorer. Il souffre de son désir de vouloir arrêter le temps. Il cherche l'impossible, l'inaccessible.



Nabokov n'affiche aucune orientation morale dans le roman en respectant l'intelligence de ces lecteurs. Cette neutralité a joué un rôle dans la censure de ce livre, dans les polémiques, mais aussi dans l'importance littéraire de ce roman.

On peut réduire ce roman à un dossier de déviance sexuelle immorale, ou nous pouvons considérer le texte comme une œuvre de fiction, reconstruction, réinterprétation et expression.

Lolita est une œuvre de fiction qui ne cherche pas à guider le lecteur vers une transcendance morale. Il raconte, il détaille et nous offre l'occasion de penser et de réfléchir.

Le roman a fait l'objet de deux adaptations cinématographiques :
- Lolita de Stanley Kubrick, en 1962
- Lolita d'Adrian Lyne, en 1997

 

 

Brève biographie de Vladimir Nabokov

 

Romancier et critique littéraire, Vladimir Nabokov nous a laissé un héritage littéraire caractérisé par un amour du langage et des jeux de mots. Avec le temps, il devenait de moins en moins lyrique, plus complexe et plus sophistiqué.

Nabokov est né à st Pétersbourg en Russie le 22 avril 1889 d'un père juriste connu pour ses idées politiques humanistes. Le père de Nabokov était un anglophile, la famille Nabokov lisait les livres anglais et consommait des produits anglais. L'enfant était soigné par d'institutrices anglaises.

À l'âge scolaire, Nabokov parlait aussi bien l'anglais que le russe. Pendant sa scolarité, il irritait ses professeurs par ses jeux de mots, par son penchant pour le langage et la linguistique. Il appréciait également les mathématiques, les échecs, football, tennis et boxe. Il commença à rédiger de la poésie à l'âge de 13 ans, en français, en russe ou en anglais. Selon sa biographie, sa passion pour l'écriture a débuté en 1914.
En 1917, le père, député de la Douma (le parlement russe) fut emprisonné et déchu de ses droits politiques.
Après la révolution russe, la famille Nabokov était déshéritée. Le père décide de quitter la Russie pour Londres en 1919. Nabokov et son frère sont entrés à l'université de Cambridge. Nabokov reçoit son diplôme avec que des félicitations en 1922. Il rejoint sa famille à Berlin, où les monarchistes russes assassinent son père.
À Berlin, Nabokov commence à publier quelques articles dans les journaux. Il vit en enseignant le français, anglais ou la langue russe.

Il est amoureux de Svetlana Siewert, qui devient le sujet de ses poèmes jusqu'à 1923.
En 1925, ils se marient avec Slonim. 
Il publie son premier roman Mary 1926 qui rend compte de sa première passion pour une femme nommée Valentina Shulgina. Ce roman est le texte le plus poétique publié par Nabokov. La version russe du livre reçoit peu d'attention. La traduction anglaise de ce livre à enthousiasmer les critiques.
En 1937, il obtient la permission de séjourner en France avec sa famille où il s'installe définitivement après l'accès au pouvoir des nazis à Berlin.

Son deuxième livre, la vie réelle de Sebastian Knight (1941), a été écrit en anglais.
Nabokov quitte la France pour les États-Unis pour enseigner les langues slaves à l'université de Stanford en 1941. L'année suivante, il est professeur de littérature à l'université Wellesley
jusqu'à 1948.
Il devient citoyen américain en 1945. Il est nommé en 1949 comme professeur de russe et de littérature européenne dans l'université de Cornell, où il allait enseigner jusqu'à 1959.
En 1951, il publia ses mémoires d'enfance en Russie. En 1956 il publie un roman sur un russe enseignant émigré dans une université américaine.

En dépit de sa notoriété universitaire, Nabokov était inconnu aux États-Unis ou en Europe avant la publication de Lolita. Ce livre est considéré par les critiques comme un roman majeur du XXe siècle. Le manuscrit fut rejeté par quatre éditeurs américains en raison de son sujet. Il fut publié par une société parisienne spécialisée dans la littérature érotique. Le roman attire l'attention d'un public restreint au début, puis du grand public. Le livre fut interdit au Royaume-Uni. Graham Green, un grand auteur anglais, reçoit un exemplaire de ce roman interdit et ne dissimula pas ce son enthousiasme pour ce livre et pour Nabokov. Il écrit que Lolita est l'un des meilleurs livres de l'année 1955. Après maintes polémiques, le livre fut édité en Angleterre. Dans un délai de cinq semaines, Lolita devint le roman le plus vendu et le plus célèbre dans le monde anglo-saxon, cité dans les listes de best-sellers pendant des mois.
Nabokov accepta de vendre les droits du scénario à Stanley Kubrick en 1962. Après cette réussite, Nabokov démissionne et se consacre entièrement à l'écriture.

À l'âge de 70 ans, Nabokov publie son deuxième livre majeur : Ada ou l'ardeur. Un roman qui raconte une relation incestueuse entre un frère et sa demi-sœur. Encore une fois, le roman devient un best-seller aux États-Unis et en Angleterre, puis en Europe. Ce roman est considéré comme un livre ambitieux, complexe, magistral, un roman incontournable.
Installé en Suisse, Nabokov décède le 2 juillet 1977 à l'hôtel du palais de Montreux en Suisse où il vivait depuis 1959.

 

 

Nabokov : contexte littéraire


Nabokov déclarait que sa fiction a respectée le sens moral et social. De nombreuses critiques ont accusé Nabokov d'être indifférent aux problèmes sociaux ou éthiques de son époque.
Ces critiques ne voulaient pas prendre en compte les structures et les personnages qui forgent les romans de Nabokov. Ni tragédie, ni mélodrame, ni analyses psychologiques. Nabokov, à la façon d'un Joseph Conrad ou d'un Proust, proposait aux lecteurs un tableau riche en détails, dans un style sophistiqué.
Humbert idéalise Lolita, représentante de la superficialité de la culture américaine dans le regard d'un Européen sophistiqué. Nabokov exprime cet affrontement entre deux visions culturelles à travers une vision ironique et satirique. Sans tomber dans la pornographie, Nabokov dessine l'immoralité des personnages à travers leurs actes et parfois à travers leurs pensées. En exposant les caractères de ces personnages, Nabokov peut irriter ceux qui voient dans Lolita une victime absolue. Les critiques estiment que le personnage de Lolita n'est pas irréprochable, une adolescente sexualisée, séductrice, qui séduit un pédophile, pour lui échapper ensuite vers les bras d'un autre pédophile.
Le comportement de l'adolescente non éduquée, sexualisée, séductrice est devenu un comportement stéréotypé. Le terme Lolita désigne aujourd'hui dans le langage populaire ce comportement adolescent risqué et stigmatisé socialement.
La mère de Lolita est décrite comme un personnage égoïste, sans intelligence et sans profondeur.

 


À travers ce roman, Nabokov parodie la culture américaine des années 50. En réalisant une allégorie extrême, il pose à sa façon des questions à ses lecteurs.
Le personnage d'Humbert Humbert reflète un homme non affilié, sans attache, narcissique, piégé par ses désirs inaccessibles, un homme hors société, hors éthique.

On retrouve la même structure romanesque dans le roman de Dostoïevski Notes d'un souterrain (1864), ou journal d'un fou (1835) de Nikolai Gogol. On peut imaginer que ces écrivains avaient influencé Nabokov.
Ce personnage produit d'une société individualiste, allait surgir par la suite, dans de nombreux romans, à travers lesquels on observe l'influence de Nabokov sur d'autres écrivains comme Salman Rushdie, et Albert Camus. Dans l'étranger d'Albert Camus, il existe ce personnage non affilié, une caricature de certains marginaux de notre société.

La prose de Nabokov a été louée pour sa complexité et ses caractères espiègles, ces métaphores qui rappellent l'écriture de Proust. Plusieurs de ses romans sont considérés comme des chefs-d'œuvre, y compris Lolita, en dépit des polémiques concernant son contenu et son thème.

 

Références :

Dictionary of Literary Biography, Volume 244: American  Short-Story Writers Since World War II, Fourth Series. A Bruccoli Clark Layman Book. Eds. Patrick Meanor, State University of New York College at Oneonta, and Joseph McNicholas, State University of New York College at Oneonta. Detroit : GaleGroup, 2001.
Grayson, Jane. Nabokov Translated: A Comparison of Nabokov's Russian and English Prose. Oxford : Oxford University Press, 1976.
Mason, Bobbie Ann. Nabokov' s Garden : A Guide to Ada. Ann Arbor, Mich. : Ardis Press, 1974.
Novels for Students. Vol. 9. Ed. Deborah A. Stanley and  Ira Mark Milne. Detroit : Gale, 2000.
Short Stories for Students. Vol. 15. Ed. Carol Ullmann. Detroit : Gale, 2002.
Wood, Michael. The Magician's Doubts: Nabokov and the Risks of Fiction. Princeton, N.J. : Princeton University Press, 1995.
Zimmer, Dieter E. A Guide to Nabokov's Butterflies and Moths. Hamburg : D. E. Zimmer, 1996.

 

 

 

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Films comme documents sociologiques

 cinema sociologie


 

Les films sont une construction culturelle et ne reflètent pas la réalité, mais essaient de dessiner une réalité vraisemblable.
La sociologie et le cinéma entretiennent des liens ambigus : ils traitent souvent des mêmes objets, mais avec des points de vue, des méthodes et des objectifs différents. C'est également le cas de la littérature, un mélange subtil et complexe de sociologie et de psychologie dans un jeu de style. Dans ce sens, le cinéma est une voie d'accès à la connaissance du réel. Certains films marquent une époque, sont l'image d'un moment ou d'une tendance, deviennent un document comme une vieille photo de vacances. Il est difficile de nier le caractère sociologique de certains films comme Les Temps modernes de Chaplin.
Nous avons choisi certains films pour tracer l'évolution de notre société, des films qui ont eu le privilège d'avoir le succès populaire et la capacité de résumer un mouvement sociologique.

 

4 mariages et enterrement


1- Quatre Mariages et un enterrement

Avec Hugh Grant , Andie MacDowell , Kristin Scott Thomas, réalisé par Mike Newell en 1994.
Le passage où Hugh Grant abandonne la future mariée devant l'autel est devenu une scène d'anthologie. Grant est un homme qui refuse de se marier, acceptant le scandale, l'humiliation publique pour lui et pour la future mariée, il fait le choix de l'amour en sacrifiant les apparences sociales. À la sortie du film, cette scène est remarquée, inattendue, politiquement incorrecte. Un geste misogyne et irresponsable ?  Un geste d'amour et de romantisme qui distinguent l'homme moderne ?  


Ce film rappelle la fin de la masculinité traditionnelle héritée du 19e siècle, définissant l'homme par ses devoirs. L'homme devrait veiller au respect des conventions sociales pour être apprécié dans la société, devrait se comporter comme " un homme ", devrait négliger ses propres sentiments et ses propres intérêts pour le bien de sa famille et de la collectivité. Après deux guerres, où les hommes avaient payé le prix fort, les années 60 voient l'apparition d'un homme nouveau, qui sera capable dans les années 90 de rejeter les conventions sociales pour chercher son propre bonheur. Entre individualisme et hédonisme, le cinéma des années 2000 nous montre cet homme occidental moderne, qui refuse d'être sacrifié par la société pour le couple. Les femmes se trouvent en face d'un homme qui revendique ses droits au-delà du couple. Certaines femmes critiquent cet homme nouveau, irresponsable, sans virilité traditionnelle, immature, et irresponsable. D'autres voient une évolution inéluctable dans une société individualiste.  

 

you got a mail



2 - Vous avez un message

Un film de 1999, réalisé par Nora Ephron, avec Tom Hanks et Meg Ryan,
Dans un scénario de romance, un homme et une femme vont s'apprécier sur internet, dans une relation virtuelle et vont s'affronter dans le réel. L'intrusion des moyens modernes de communication allait métamorphoser les relations hommes-femmes et la naissance des couples. En dehors du couple, hommes et femmes s'affrontent également dans une compétition professionnelle. Le couple devient un défi.
Dans trois films, Meg Ryan va dessiner les contours de la rencontre et de la relation entre un homme et une femme dans la société occidentale. Dans Quand Harry rencontre Sally  (1989, film réalisé par Rob Reiner avec Billy Crystal), le spectateur réfléchit en souriant sur la fragilité du couple moderne, sur la difficulté de rester neutre en face de la séparation avec ses années de deuil et de frustration.
Dans le film suivant " Vous un avez un message ", l'amour triomphe, comme toujours dans les films de romance, mais dans une société différente, où les grands phagocytent les petits, où les commerces ferment sous la pression des grands magasins, laissant les quartiers et les centre-ville vides et sans activité. Le couple devient refuge, havre de paix dans une société anxiogène.
Dans le film " Nuits blanches à Seattle " 1993, réalisé par Nora Ephron
avec Meg Ryan et Tom Hanks, nous restons sur le même sujet.  Nora Ephron nous raconte la difficulté de rencontrer, de trouver la (le) partenaire, de construire un couple dans une société où il est plus probable d'être tuée dans un attentat que de trouver un homme.


 À travers ces trois romances, Meg Rayn désigne ce changement sociologique radical, le couple devient fragile, devient rare en raison de l'évolution de la société et des changements de rôle. Les femmes ne sont plus prêtes à tout sacrifier pour le couple, les hommes non plus. Pourtant, dans un monde de solitude et d'isolement, l'autre devient plus précieux, plus indispensable que jamais.

La vie est un long fleuve tranquille


3-   La vie est un long fleuve tranquille

Un film d'Étienne Chatiliez, réalisé en 1988, avec  Benoît Magimel, Valérie Lalande et Tara Römer.
Dans une petite ville vivent deux familles aussi différentes que possible, aussi caricaturales que possible. Le réalisateur réussit un film devenu culte, aux dialogues devenus proverbiaux (c'est lundi, c'est raviolis "), et chanson humoristique (Jésus revient), caricatures cruelles, et une sociologie fine.
Le film nous dévoile une société coupée en deux quartiers inconciliables, séparés par des policiers. La différence se manifeste par le comportement et le langage, par l'argent, et par la culture.
À chacun de choisir son quartier, ses traditions et sa tribu. Mais Momo devra manier deux identités presque antagonistes comme sa sœur. Voilà le problème.
 Dans d'autres films, Chatiliez, dessinera dans Tatie Danielle  (1990) une caricature sans nuances d'une nouvelle génération de personnes âgées en France, de retraités riches et en bonne santé, qui refusent d'être infantilisés ou marginalisés.
Dans son film Tanguy (2001), c'est le nouveau jeune qui sera caricaturé, le jeune qui ne veut plus quitter ses parents, les jeunes adultes immatures, qui veulent rester enfants, insupportables pour les parents. Ils refusent la responsabilité, incapables d'affronter le monde réel et la société anxiogène.  
Chatiliez est le réalisateur qui a réussi un pari difficile : décrire la société et son époque sans céder à la pensée dominante, en faisant rire et en invitant à la réflexion.

 

lost in translation


4- Lost in translation

De Sofia Coppola en 2003, avec Bill Murray, Scarlett Johansson, Giovanni Ribisi
Si vous passez quelques jours au Japon, vous allez comprendre combien Coppola a réussi à montrer l'étrangeté de Tokyo par le prisme d'un regard occidental, ville fascinante, dérangeante, anxiogène et déroutante. Il est difficile de comprendre le Japon en utilisant les repères occidentaux.


Lost in Translation est un film sur l'intimité sociale dans un environnement hostile. Le titre fait référence à la mauvaise compréhension de la communication interpersonnelle.
Charlotte (Scarlet Johansson) est incapable de communiquer émotionnellement avec son mari, préoccupé par sa carrière pour reconnaître les besoins sociaux de Charlotte et ses insécurités.
Marié, couronné de succès et approchant du crépuscule de sa carrière, Bob (Bill Murray) a perdu le sens de sa vie, guidée par des réalisateurs, par des hommes d'affaires et par sa famille. Il est désintéressé par le Japon, et par toute forme d'interaction sociale.
Bob et Charlotte se rencontrent. Leur solitude les relie et ils peuvent trouver un réconfort immédiat dans la compagnie l'un de l'autre. Ils sont capables de se comprendre. Bob danse et chante toute la nuit avec Charlotte. Bob aide Charlotte à faire face à ses insécurités en lui donnant l'interaction sociale dont elle a besoin et en lui faisant comprendre que même si la vie à son âge est remplie d'obstacles, elle " s'améliore ".
Charlotte pose doucement la tête sur l'épaule de Bob après une longue nuit d'activités festives, Bob ramène Charlotte endormie dans sa chambre. Ces scènes fournissent un sentiment de compréhension qu'aucun mot ne peut exprimer.
Lorsque Bob embrasse passionnément Charlotte à la fin du film, tout en chuchotant silencieusement à l'oreille alors qu'elle pleure son départ, nous sentons intimement leur affection et leur douleur.
Ce film nous rappelle un trait important de notre société. L'occident ne comprend pas toujours les autres, les occidentaux n'arrivent pas toujours à se comprendre, et vivent dans un isolement social douloureux. Nous ne validons pas les besoins des autres, nous recevons des autres la même invalidation accompagnée de leur indifférence.  

  amelie poulain

 

5-  Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain

De Jean-Pierre Jeunet, 2001 avec Audrey Tautou, Philippe Beautier, Régis Iacono
Il n'est pas étonnant de trouver dans les livres de psychologie positive des exemples de productions culturelles traduisant et renforçant cette notion de psychologie positive en vogue en occident depuis plusieurs années. Le film " le Fabuleux destin d'Amélie Poulain " y figure en bonne place.
Un des fondateurs de la psychologie positive Martin Seligman écrit : " Renforcer la force humaine : c'est une mission oubliée de la psychologie ".
Avant la Seconde Guerre mondiale, la psychologie avait trois missions : guérir la maladie mentale, rendre la vie personnelle plus épanouissante, et identifier et encourager les talents. Pendant des années, la psychologie se consacrait essentiellement au traitement des troubles mentaux négligeant les autres missions : améliorer la vie personnelle et nourrir les facultés positives de chacun.
Si vous devez raconter le comportement de personnes bloquées un vendredi soir dans un aéroport en raison de mauvais temps, vous avez le choix. Vous pouvez décrire des voyageurs irrités, râleurs, agressifs, et déprimés. Vous pouvez aussi décrire le positif, comme ce chanteur bloqué avec les voyageurs qui a pris sa guitare pour improviser un récital faisant chanter et applaudir les voyageurs, ou détailler l'histoire de l'hôtesse qui reste après la fin de sa longue journée de travail pour distraire les enfants et les calmer en regardant la neige. La réalité sincère serait de décrire les deux visages de cet événement et de montrer comment le positif peut nuancer le négatif. C'est le but de la psychologie positive, héritière à la fois de la psychologie et de la philosophie occidentale.
Le film Amélie poulain est une dose agréable de psychologie positive, et cultive certains talents humains utiles pour améliorer la qualité de vie et pour vivre heureux. Amélie est curieuse des autres, elle aime bien aider. Elle réussit à sortir son père de son isolement, à aider sa voisine à faire son deuil, à calmer l'épicier. Quand il s'agit de sa propre psychologie, elle est encouragée et aidée à dépasser sa timidité, pour accepter la joie de vivre, et initier une vie amoureuse.
La réussite du film dépend du son sujet, d'une association réussie de talents, et également de la bonne réception du public.
La réussite de ce film agréable et optimiste souligne l'accueil favorable du public face à ces tendances de la psychologie positive à éclairer le bon, le beau et le génial de nos vies.

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La passion d’Augustine, un beau film

lapassiondaugustine

La passion d’Augustine : musique, et modernité des femmes


Depuis le 30 mars, ce film canadien est à l’affiche dans de nombreuses salles en France. Je vous invite à allerle voir.

Vous ne serez pas déçu. Vous allez assister à un film drôle, léger, grave par moments, où des morceaux de musique classique glissent avec beauté sur la neige de l’hiver québécois.
Au début des années 60, de nombreux changements vont secouer une petite école religieuse. Concile Vatican II, le gouvernement canadien décide la séparation de l'Eglise et de l'Etat, pour alléger le poids de l’église sur la société québécoise. La scénariste situe son récit entre les murs d'une école de filles tenue par des religieuses. La Mère supérieure, Mère Augustine a fondé cette école de musique dans le couvent. Plusieurs histoires se déroulent en même temps. La nièce de la mère supérieure sera admise au sein de l'institution, une jeune fille qui révèle ses immenses talents de pianiste. En même temps, il s'agit de s'adapter, de se battre pour sauver l’école de musique menacée de fermeture.


Ce film évite les clichés sur les religieuses et les écoles religieuses. La réalisatrice nous accompagne dans les salles de classes, les dortoirs, les couloirs, les salles de musique de ce couvent au bord du fleuve Richelieu. Ces femmes religieuses qui pensaient que les saisons vont se succéder, vont affronter les changements imposés par la modernité et la société, avec courage, et intelligence


Quand elles décident d'ôter leurs voiles, de s’habiller en des tenues plus adaptées aux temps nouveaux, elles expriment leur appréhension, et leur pudeur avec sincérité. C’est un passage de la religion à la spiritualité véhiculée par la musique. Quand la nièce se met à jouer, le spectateur savoure un moment de grâce. Ces religieuses enseignent la musique et non pas un discours dogmatique.


Le film est une surprise, disent les médias de la belle province. Le public a aimé. Le film a reçu des prix au Québec et le prix du public au Festival d’Angoulême. Le film réhabilite ces établissements si décriés dans la belle province dans les années 60.
La réalisatrice a choisi une forme classique sobre et efficace. Les actrices jouent avec justesse dans des images éclairées par une belle lumière et adoucies par le chant choral et par des compositions pour piano. Céline Bonnier, qui joue le rôle de la mère Augustine mérite mention.


Ce film est récompensé plusieurs fois :
- Festival du film francophone d'Angoulême, Prix du Public
- Rencontres Cinématographiques de Cannes 2015, Prix du Public
- Festival du Cinéma et de la Musique de la Baule 2015 - Prix du Meilleur Scénario et Prix du Public
- Festival du Film de Sarlat, 10-14 Novembre 2015
- Festival du Film Francophone d'Albi, Novembre 2015

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Les mots pour lui dire: un bon Hugh Grant

les mots pour lui dire1

Des mots pour lui dire pour passer une bonne soirée

Ce film est sorti en décembre 2015, il est disponible en DVD. Hugh Grant partage l'affiche avec Marisa Tomei, Allison Janne. Ce film est la troisième rencontre entre Grant et le réalisateur Marc Lawrence après les deux films : où son partis les Morgans et le come back.

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4 raisons pour voir le film Boomrang

boomrang, le film

Hier, j'ai vu le film Boomrang de François Favart.

Je l'ai raté à sa sortie en septembre.

En revenant avec sa sœur Agathe sur l'île de Noirmoutier, berceau de leur enfance, Antoine ne soupçonnait que son passé va revenir comme un boomerang. Souvenirs incertains, les non-dits familiaux, les dissimulations. À sa disparition mystérieuse de sa mère, le père choisit la pire solution, le silence. La sœur Agathe préfère ne pas savoir, d'enterrer le passé avec le corps de sa mère. À la fin du film, on découvre qu'il s'agit bel et bien d'un secret, que la mort de la mère n'était pas une noyade mais un drame.

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