De nombreuses séries télévisées actuelles, basées sur une œuvre littéraire ou sur un scénario, n’hésitent pas à sexualiser les personnages dans un contexte donné.
Nous devinons facilement que l’audience représente la motivation première dans cette sexualisation du contenu et de la réalisation. D’autres justifications peuvent surgir : le souci de s’approcher de l’intimité des personnages, de transmettre aux spectateurs un contexte historique dans sa globalité, où la vie personnelle et intime rejoint le collectif et l’environnement historique.
Observer l’histoire dans la chambre à coucher, comme une romance historique. Mettre en arrière-plan un contexte historique donné, implanter des personnages, décrire la vie de ces personnages. À partir de ce contexte historique, il s’agit de peindre le style de vie d’une époque, coutumes, façon d’exprimer des émotions, la vie intime, amoureuse, et accessoirement sexuelle.
La série Outlander, est une romance historique qui se déroule pendant la révolution jacobite en Écosse. L’héroïne traverse le temps pour vivre une grande histoire d’amour, avec un insurgé jacobite. Cette histoire d’amour passe de la séduction à la sexualité, du mariage à la grossesse. Les scènes sexuelles présentes dans le roman Outlander de Gabaldon, leur transcription à l’écran offre au spectateur un aperçu de la sexualité dans l’Écosse du 18ème s siècle et des relations entre les hommes et les femmes à cette époque. On voit des scènes sexualisées, des discussions sur les pratiques sexuelles, sur le désir, sur le corps et sur les émotions. La sexualité est montrée, décrite, commentée et détaillée, pour nous rappeler la difficulté de la condition féminine à cette époque. Violence et insécurité obligeant les femmes à accepter la protection des hommes. La relation entre les deux héros se transforme en relation amoureuse égalitaire. Les motivations sexuelles sont de nature émotionnelle et amoureuse.
La série télévisée Versailles suit une vieille tradition française d’exhiber la vie intime des monarques, leur sexualité, leurs partenaires, et leur préférence. La série expose les relations homosexuelles du dauphin, les relations entre Louis XIV et ses favorites. La série, généreusement parsemée de scènes explicites homosexuelles et hétérosexuelles, transmet quelques détails sur la sexualité de la classe dirigeante, sur le couple, la fidélité, sur les comportements de deux sexes, et sur les motivations sexuelles. La série Versailles dessine des relations sexuelles fondées sur le pouvoir, et parfois sur la survie. Il n’existe que peu d’amour à Versailles. L’argent, le désir, et l’ambition motivent l’acte charnel.
La série Poldark reprend le roman de Winston Graham qui décrit l’Angleterre vers la fin du XVIIIe siècle. Une relation amoureuse entre Poldark et sa cousine Élisabeth dans un contexte de difficultés économiques, de pauvreté, de corruption politique. Cette série reflète le double standard de l’époque, les femmes devaient garder leur virginité, cultiver la vertu pour trouver le meilleur mari possible, condition indispensable pour exister, et pour survivre.
La série Tudors n’a pas besoin de contexte pour montrer des scènes sexualisées. L’histoire réelle d’Henri VIII demeure une succession de problèmes de chambre à coucher : infertilité de sa première femme, attirance vers la deuxième, trahison et infidélité pour les autres épouses. La cour royale de l’Angleterre du 16e siècle devient le théâtre d’intrigues amoureuses, de messages érotiques, de gestes de séduction, et de jeux d’attirance. La série décrit la sexualité de cette époque, une sexualité partagée entre les traditions religieuses, et entre les désirs individuels assouvis discrètement. La condition féminine laisse à désirer même au sein de la classe dirigeante. En dépit de ses nombreux mariages, le comportement sexuel d’Henri VIII se dirige essentiellement vers la reproduction, l’enfantement, et la recherche d’un héritier.
Depuis plusieurs années, nos petits écrans se dévergondent, nos soirées ne manquent pas d’images et de dialogue sexualisés. Cependant, devant ces feuilletons, le public observe avec amusement et intérêt la jupe relevée, ou les culottes déchirées.
En dépit d’images sexualisées nombreuses, beaucoup de gens se sentent inconfortables par rapport à la sexualité et aux discussions relatives au comportement sexuel. Nous regardons sans problème Louis XIV en train de flirter avec sa belle-sœur, nous évitons de parler de notre propre sexualité, de notre propre époque, de nos propres comportements.
De nombreuses personnes jugent qu’il est inapproprié de parler sexualité, commentant avec un petit sourire les études sur le comportement sexuel, ou sur l’histoire de la sexualité en général.
Si les livres traitant de la sexualité ou de l’histoire de la sexualité sont rarement consultés par le grand public, l’avalanche de scènes sexualisées dans les séries peut engendrer certains effets bénéfiques sur notre culture populaire : valider le désir sexuel masculin et féminin, déculpabiliser vis-à-vis de la sexualité, remettre la sexualité dans un contexte culturel et historique, et permettre à chacun de mesurer l’évolution de nos comportements individuels et collectifs.
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